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Déclaration du ministre #Alpha_Barry à la réunion des membres du Conseil de Sécurité de l’Organisation des #NationsUnies relative à l’examen du Rapport du Secrétaire Général de ladite Organisation sur la situation dans la région du #Sahel,

الخميس, 16 (آيار (مايو 2019
المتحدث: 
New York
المكان: 
New York

  • Monsieur le Président du Conseil, cher Ambassadeur Djani,
  • Madame Bintou KEITA, Sous-Secrétaire générale,
  • Mesdames et Messieurs les membres du Conseil de Sécurité,
  • Excellence Monsieur Pierre BUYOYA, Haut représentant de la Commission de l'Union Africaine pour le Mali et le Sahel,
  • Monsieur Angel Losada, Représentant spécial de l'union Européenne pour le Sahel
  • Monsieur Yuri Fedorov, Directeur Exécutif de l'ONUDC,
  • Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
  • Mesdames et Messieurs

Monsieur le Président du Conseil,

Je voudrais avant tout propos, vous féliciter, au nom de l’ensemble de mes collègues du G5 Sahel, pour votre accession à la présidence du mois du Conseil de Sécurité et pour la tenue de cette réunion importante consacrée à l’examen du rapport du Secrétaire Général sur la Force Conjointe du G5 Sahel.

Je saisis l'occasion pour saluer l'Allemagne pour sa présidence pour le mois d'avril et la France pour le mois de mars, mois durant lequel, le Conseil de Sécurité a visité le Burkina Faso et le Mali.

Madame la Sous-secrétaire Générale,

Après le rapport qui vient de nous être présenté, je voudrais, au nom de l’ensemble de mes collègues du G5 Sahel, adresser nos félicitations au Secrétaire Général des Nations Unies pour la qualité de son rapport. Les pertinentes recommandations qui y sont formulées, témoignent, s'il en était encore besoin du soutien et de la détermination du Secrétaire général à trouver les voies et moyens pour mettre en place un dispositif d'appui à la Force Conjointe.

  • Monsieur le Président,
  • Mesdames et Messieurs les membres du Conseil de Sécurité,

Cela fait maintenant deux ans que les Chefs d’Etat du G5 Sahel, dans leur grande sagesse et réalisme, ont jugé indispensable de se doter d’une Force pour contrer l’offensive de déstabilisation des groupes armés terroristes contre leurs Etats.

Vous les avez compris et vous les avez soutenu, parce que convaincu que le risque de déstabilisation qui plane sur les pays du G5 sahel est profond et constitue une véritable menace à la paix et à la sécurité internationales.

En deux années d’existence, si la Force conjointe est encore loin d’atteindre sa pleine capacité opérationnelle, nous pouvons toutefois noter avec satisfaction quelques avancées. La Force conjointe est, aujourd’hui, opérationnelle à 90% sur le fuseau Ouest, 74% sur le fuseau Centre et 75% sur le fuseau Est.

Elle est passée de la phase de conceptualisation à la phase de concrétisation avec à son actif, plusieurs opérations majeures. Depuis le début de l’année 2019, la Force a déjà mené sept opérations : deux dans le fuseau Est, trois dans le fuseau Centre et deux dans le fuseau Ouest.

L’Accord de coopération technique entre la MINUSMA et la Force Conjointe a permis à la Force Conjointe de mener avec succès les opérations SANPARGA I et II sur le fuseau centre, depuis janvier 2019.

A travers ces opérations, la Force Conjointe du G5 Sahel s’inscrit dans un cycle opérationnel optimal en vue d’enclencher une dynamique susceptible de neutraliser les groupes terroristes et criminels de tout genre.

Bien entendu, ces interventions se font dans le respect strict du cadre de conformité via des mécanismes visant à garantir le respect des droits de l’homme et du Droit International Humanitaire.

C’est le lieu de saluer l’élan de solidarité agissante exprimée par le Conseil de Sécurité à l’endroit des pays du G5 Sahel, à travers notamment l’adoption de la résolution n° 2359 (2017) autorisant le déploiement de la Force conjointe et l’adoption de la résolution 2391 (2017) invitant à conclure un accord technique entre l'ONU, l'UE et les Etats du G5 Sahel, en vue d’apporter un soutien spécifique à la Force conjointe quand elle opère sur le territoire malien.

Monsieur le Président,

Malgré ces progrès encourageants, la situation demeure préoccupante pour ne pas dire qu’elle continue de se dégrader.

Au moment où se tient notre réunion, le Sahel est encore sous le choc de l’attaque ignoble perpétrée ce dimanche contre une église du centre-nord du Burkina Faso et qui a fait six morts dont le prêtre qui officiait la messe. Particulièrement visé, ce dernier a été froidement abattu par un groupe d’assaillants, des terroristes qui ont fait irruption dans le village.

Exactement deux semaines avant, c’était une église protestante du nord du pays avec le même bilan macabre de six morts dont le pasteur de cette église.

Dans la nuit du 13 au 14 mai, c'est un Imam et son fils qui ont été froidement assassinés.

Entre ces assassinats, nous avons enregistré l’enlèvement de touristes français au Bénin. Certes le Bénin n’est pas le Sahel, mais la destination des ravisseurs avec leurs otages avant qu’ils ne soient stoppés par une intervention militaire coordonnée entre français et burkinabè prouve qu’il s’agit d’une œuvre des mêmes groupes terroristes qui troublent la paix au Sahel.

Ces exemples auxquels il faut ajouter de nombreux autres attentats et attaques au Mali, au Niger et dans les autres pays sont la preuve de la persistance de la menace terroriste au Sahel.

Pas plus tard qu’avant-hier, soit le 14 mai, l’armée nigérienne a encore subi une attaque d’envergure ayant causé la mort de vingt-huit (28) militaires à la frontière avec le Mali. De même, douze (12) civils peuls ont été tues lundi dans la région de Ségou, dans le Centre du Mali.

Les groupes terroristes qui se financent à partir des sites d’or artisanaux ou encore de divers trafics restent toujours forts et exercent une pression énorme sur nos États. Partout, la menace gagne du terrain. Elle n’est plus contenue seulement dans le nord du Mali, dans le Sahel burkinabè ou loin des frontières de la Mauritanie, elle se propage et prend d’autres formes aux conséquences aussi dramatiques les unes que les autres.

Monsieur le Président,

Le Sahel aujourd’hui ce sont des dizaines de victimes dénombrées tous les mois. Des victimes d’embuscades, d’enlèvements, de tueries ciblées ou massives, d’attaques à l’aide d’engins explosifs improvisés.

La première conséquence de cette situation, ce sont les conflits ou tueries communautaires. Et à ce niveau, nous avons atteint le sommet de l’horreur avec des tueries communautaires à Inates au Niger, à Yirgou et Arbinda au Burkina Faso et à Koulognon et à Ogossagou au Mali. Depuis le début de cette année 2019, on enregistre au moins 300 morts du fait seulement de conflits communautaires.

Le Sahel aujourd’hui, c’est aussi, les attaques contre les écoles, à travers des incendies, des saccages de bâtiments ou des menaces proférées contre les enseignants. Les attaques contre les symboles de l’Etat, les pillages des marchés ou les vols de bétail...

 

Tout cela a pour conséquence, la fermeture des administrations publiques, des dispensaires et des écoles avec des milliers d’enfants privés de cours et avec des déplacements massifs de populations et de réfugiés.

 

Ainsi, au Mali et au Burkina Faso réunis, on enregistre plus d’un demi-million d’enfants privés d’écoles. Environ 150 mille personnes se sont déplacées à l’intérieur du territoire burkinabé, 600 mille au Tchad.

 

De part et d’autre des frontières, on dénombre des milliers de réfugiés qui viennent s’ajouter aux dizaines de maliens réfugiés au Burkina et en Mauritanie depuis 2012.

Monsieur le Président,

Comme on le voit, les pays du Sahel font face à une situation humanitaire hors de contrôle avec des chiffres qui explosent sans cesse. Je voudrais remercier ici tous nos partenaires qui nous viennent en aide pour faire face à l’urgence humanitaire. Mais devant l’ampleur de la situation, nous avons besoin d’une assistance beaucoup plus importante pour y face.

A côté de l’urgence humanitaire, il apparait que le défi sécuritaire demeurera encore pour longtemps notre urgence majeure pour éviter la déliquescence de nos États et prévenir un chaos généralisé sur notre continent avec sûrement des répercussions multiples prévisibles dans le reste du monde. 

Pour relever donc ce défi sécuritaire, les États du G5 Sahel investissent énormément dans la sécurité. La part des budgets nationaux consacrés aux dépenses de sécurité représente 18 à 32% selon les pays.

 

C’est énorme pour nos économies et c’est coûteux pour nos services sociaux de base dont la part de budget se réduit considérablement d’année en année.

 

C’est face à toutes ces urgences et face à ces défis énormes que nous lançons un appel au Conseil de Sécurité et à l’ensemble des partenaires, à davantage soutenir les efforts inestimables des Etats membres du G5 Sahel.

Monsieur le Président,

Ce soutien devrait se traduire par une opérationnalisation complète de la Force conjointe le plus rapidement possible.

Aujourd’hui, cette Force du G5 est sur pieds. Mais nous sommes encore dans la phase d’équipement.

Quand bien-même des opérations ont été menées jusque-là par la Force conjointe du G5 Sahel, le manque d’équipements, notamment les équipements lourds, reste un handicap réel pour que la Force atteigne sa pleine capacité opérationnelle.

En outre, il faut noter que l’Accord technique entre la MINUSMA, l’Union Européenne et la Force Conjointe du G5 Sahel qui permet de soutenir les opérations de la Force sur le terrain ne couvre que les interventions sur le territoire malien.

 

Cela revient à dire que le soutien apporté dans le cadre de cet accord ne concerne que 2 bataillons sur les 7 constitués. Or, comme on l’a déjà démontré ici, la menace est dans tout le Sahel.

 

C’est donc avec satisfaction que nous prenons acte de la recommandation du Secrétaire Général Antonio Guterres faite à cet auguste conseil « d'étudier la possibilité d'apporter un soutien à travers la MINUSMA à tous les bataillons opérant dans le cadre de la Force conjointe sous la condition que cette dernière ou d'autres partenaires prennent la responsabilité de l'acheminement de l'aide dans leurs zones d'opérations", soit au-delà du territoire malien.  

 

Au nom du G5 Sahel, j’invite le conseil de sécurité à accéder à notre demande présente, relayée par le Secrétaire General afin d’établir une nouvelle formule d’appui des Nations Unies à la Force conjointe et de lui permettre ainsi de pouvoir mieux répondre à ce défi sécuritaire, qui, faute de réaction adaptée, risque de se transformer en une situation de péril en la demeure dans la bande sahélo-saharienne et bien au-delà. 

 

Monsieur le Président,

 

La lutte contre le terrorisme dans le Sahel est une lutte pour la survie des Etats du G5 Sahel. L’ampleur des menaces de contagion des régions côtières voire de déstabilisation de la région est réelle.

 

L’enlèvement récent de deux français dans le nord du Bénin est une alerte à prendre au sérieux quant au risque de contagion, car le Bénin, ce n’est plus le Sahel. Et ce contexte délétère du fait de la menace terroriste est un facteur potentiel d’accélération des migrations risquées et clandestines.

 

Il faut le dire, la lutte contre le terrorisme et les autres activités criminelles connexes dans la région du Sahel est une responsabilité collective et doit être traitée avec la même détermination que celle qui a prévalu en Irak et en Afghanistan.

 

Au regard de la nature urgente des actions à entreprendre, les Etats membres du G5 Sahel n’y arriveront pas tout seuls. Il est donc temps que la Communauté internationale envisage la création d’une coalition internationale pour s’attaquer davantage au phénomène du terrorisme dans l’espace G5 Sahel et dans tout le Sahel.

 

Il est temps aussi que la Communauté internationale affiche une position claire quant à la résolution de la crise libyenne. La Libye qui, en effet, reste toujours le sanctuaire d’incubation des terroristes et des criminels de tous ordres et donc le principal facteur de déstabilisation de notre région.

 

Je vous remercie pour votre aimable attention.