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SEANCE PUBLIQUE

Wednesday, 31 May 2006
Presenter: 
S.E.M. DENIS SASSOU-NGUESSO
Location: 
New York

Mesdames et Messieurs les membres du Conseil de Sécurité,

 

Je voudrais d'abord vous remercier de me donner l'occasion de m'adresser aujourd'hui à votre prestigieux auditoire, pour évoquer une question qui constitue sans doute la majeure partie de votre agenda: les conflits armés en Afrique.

 

Je le fais au nom de l'Union Africaine, une institution qui n'aura de cesse de vous exprimer sa profonde reconnaissance pour la constance de vos efforts et la détermination dont vous faites preuve dans vos initiatives en faveur de la paix et de la sécurité sur notre continent trop  longtemps meurtri et fragilisé.

 

L'action stabilisatrice que vous menez et le partenariat instauré entre le Conseil de Sécurité et l'Union Africaine sont à saluer et à encourager: ils le sont d'autant plus que notre rencontre d'aujourd'hui a lieu à la veille des missions que le conseil va entreprendre la semaine prochaine en Afrique.

 

Un heureux concours de circonstances veut que mon pays qui assure la présidence en exercice de l'Union Africaine cette année siège à vos côtés au sein du Conseil pour participer modestement à vos initiatives en faveur de l'Afrique et servir pour ainsi dire de trait d'union entre deux instances dont l'action doit toujours être marquée du sceau de l'harmonie.

 

Harmoniser nos démarches constitue en effet une exigence à laquelle nous nous employons tous fort heureusement. Une exigence qui vise l'efficacité et la crédibilité de nos approches. Cela justifie les consultations régulières que nous engageons entre nos deux institutions.

 

La manière dont nous gérons ensemble des dossiers aussi complexes que ceux de la Côte d'Ivoire et du Darfour illustre de façon éloquente la pertinence d'une telle vision.

 

Mesdames et Messieurs les membres du Conseil,

 

Le partenariat établi entre les Nations Unies et l'Union Africaine est fondé sur une vision qui établit clairement qu'il n'y a pas de paix sans développement et qu'il y a pas de développement sans paix.

 

Le Rapport du Secrétaire Général de l'ONU sur "les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique" demeure d'actualité. Il jette les bases d'une vaste stratégie de prévention prenant en compte toutes les dimensions des crises violentes qui secouent le continent africain.

 

En cela, les résolutions 1170, 1196, 1208 et 1209 adoptées en 1998 par le Conseil de Sécurité, gardent toute leur pertinence et continuent de retenir notre attention, dans la mesure où elles soulignent, je cite: "le lien étroit qui existe entre, d'une part, la paix et la sécurité internationales et le développement durable et, d'autre part, la nécessité pour la communauté internationale de faire face d'une manière globale au problème des mouvements illicites d'armes à destination et à l'intérieur de l'Afrique, qui concerne non seulement le domaine de la sécurité, mais aussi le développement social et économique."

 

Cela induit que nous devons traiter correctement, comme étant intimement liées, les questions de développement économique et social, d'élimination de la pauvreté, de réconciliation nationale, de bonne gouvernance, de justice sociale, etc… Il s'agit en dernier ressort de bâtir des sociétés viables et stables.

 

La création au sein de l'Union Africaine du mécanisme d'évaluation par les Pairs répond à ce souci d'une prise en compte multidimensionnelle des conflits. L'adhésion à un tel mécanisme marque l'éloquence de l'engagement des dirigeants africains déterminés à ancrer leurs Etats dans la modernité. 

 

Cette vision et la pratique qui s'en suit permettent à l'Afrique aujourd'hui d'entrevoir des perspectives d'évolution moins sombres.

 

On le voit aujourd'hui dans le domaine économique où des indicateurs semblent marquer une sorte de frémissement à consolider en vue d'une croissance plus soutenue.

 

On le voit aussi dans le domaine de la paix et de la sécurité, objet de mon propos.

 

Oui, l'Afrique s'oriente dans la bonne direction, même si une telle évolution n'est pas linéaire et demeure somme toute fragile. Nous voulons toutefois nous accrocher à des signaux porteurs.

 

Les exemples ne manquent pas:

 

·        la plupart des conflits actuels datent de plus de trois ans au moins et ne constituent donc pas des crises nouvelles: la Somalie – un cas tragique, la situation entre l'Erythrée et l'Ethiopie, la crise au Nord de l'Ouganda, le Sahara Occidental représentent des conflits qui s'installent malheureusement dans la durée, faute d'un traitement approprié, d'engagement ou de confiance mutuelle de la part des principaux protagonistes.

 

·        Des conflits – dont certains étaient parmi les plus aigus sur le continent - sont aujourd'hui réglés, de façon encourageante: la guerre civile en Angola, qui n'est plus qu'un mauvais souvenir, les crises au Libéria, en Sierra Leone, en Guinée Bissau et, depuis peu, au Burundi.

 

Dans la gestion de certaines de ces situations post conflit, nous plaidons pour un accompagnement international soutenu et prolongé, pour éviter toute rechute ou tout retour en arrière, d'où l'accueil positif que nous réservons à la toute récente commission de consolidation de la paix qui pourrait trouver en Afrique un terrain d'expérimentation approprié.

 

·        Pour certains autres conflits en cours, la communauté internationale dispose de scenari de sortie de crise qui devraient permettre d'entrevoir le bout du tunnel avant la fin de cette année. C'est le cas des situations en Côte d'Ivoire, en République Démocratique du Congo et au Darfour.

 

Dans les deux premiers cas, des feuilles de route existent, avec des calendriers bien fixés qu'il faut respecter. Une responsabilité particulière incombe à cet égard aux acteurs nationaux dont nous sommes résolus à accompagner les efforts.

 

Dans le cas du Darfour, à la suite de l'Accord intervenu le 5 mai 2006 à Abuja, accord  qu'il faut renforcer et mettre en œuvre, nous disposons d'un cadre de travail qui doit permettre de préparer la transition vers une opération des Nations Unies à fort caractère africain, en étroite coopération avec toutes les parties, dont principalement le Gouvernement d'Unité Nationale du Soudan.

Mesdames et Messieurs les membres du Conseil,

 

Il nous faut donc continuer à œuvrer au renforcement du partenariat entre l'Organisation des Nations Unies et l'Union Africaine et ses communautés sous-régionales. Nous nous félicitons à cet égard, de l'adoption par le Conseil de Sécurité le 14 septembre 2005, de la Résolution 1625 sur le renforcement de l'efficacité de son rôle dans la prévention des conflits, notamment en Afrique.

 

Dans la mise en œuvre de ce partenariat, notre continent dispose d'instruments appropriés: je fais notamment allusion au protocole relatif à l'établissement du Conseil de Paix et de Sécurité de l'Union Africaine et du Pacte de non-agression et de défense commune adopté à Abuja en janvier 2005.

 

En terminant ce propos d'ordre général, je voudrais particulièrement insister sur notre détermination commune à mettre un terme à ces situations inadmissibles qui sévissent encore en Afrique, en utilisant au mieux tous les moyens qu'offre la coopération internationale, particulièrement dans le cadre du partenariat établi entre nos deux Organisations.

 

Certes, un long chemin reste à parcourir. Mais j'aime à dire que le plus long voyage commence toujours par le premier pas.  La patience et l'effort prolongé constituent, à cet égard, de précieux compagnons de route.

 

J'ai donc espoir que le chemin que nous parcourons ensemble depuis si longtemps, nous conduira à terme vers des horizons plus rassurants.

 

Parce qu'il n'est écrit nulle part que la tragédie doit demeurer au cœur du destin de l'Afrique.

 

Je vous remercie